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DE PHILIPPE

sir de la voir se retourner, et en criant : « Tu es fou », se mettre à la recherche de la monnaie.

Cette grosse maison de pierre, cossue même la nuit, lui rappelait une vieille folle : elle s’était cloîtrée dans une chambre qu’elle louait pour inonder la ville de lettres anonymes. Cette libre-penseuse — elle avait toujours ce mot à la bouche — s’en prenait aux faux ménages. Ce n’était pas vertu, mais, chaste toute sa vie, elle était maintenant jalouse des maîtresses de tous ses amis.

Philippe repoussait ces images. C’est le repos qu’il voulait. Pour éviter l’asile d’aliénés, il songea à se faire pincer par la police : la prison véritable vaudrait mieux que cette prison de sœurs.

Ce qui arriva. Assis sur le pas d’une porte, n’en pouvant plus, un agent l’emmena au poste. C’était le petit matin, et des ivrognes ronflaient encore dans les cellules d’une saleté infecte.

Il y avait un petit gars pris dans une rafle, qui obtint la permission de téléphoner :

— Maman, on m’a arrêté pour rien…

Un gros agent arracha le téléphone des mains du jeune garçon :

— On va voir si t’as été arrêté pour rien… Dis à ta mère que le cautionnement est pas de dix piastres, mais de vingt-cinq piastres pour un petit voyou comme toi.

Un frisson courut sur le dos de Philippe, qui téléphona à son séminariste. Dans ses peurs,