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DE PHILIPPE

saint homme, je suis même un dôpé, et je dois sacrifier à mon vice.

— Pauvre jeune homme ! comme je vous plains ! J’ai été malheureux, moi aussi, mais grâce à Dieu, j’ai eu la force de résister. Voulez-vous que je vous conte mon histoire ? cela vous fera peut-être du bien.

Philippe n’écouta rien d’abord de ce que l’autre lui débitait d’un ton onctueux. Comme il lui arrivait si souvent, les paroles d’un autre ne lui servaient que d’accompagnement à une scène qu’il revivait. Philippe ne causait guère, les conversations ne lui étant que des prétextes qui donnaient comme le déclic à un film qui se déroulait.

Cette fois, c’est à Bernard, son camarade Alfred Bernard qu’il pensait. Le samedi après-midi, les classes terminées, ils étaient quelques-uns du collège à se rendre dans une pâtisserie, où, en causant, ils mangeaient des gâteaux. Un jour, Philippe avait proposé d’aller faire une promenade dans le quartier des filles. Alfred Bernard, qui était pieux, avait suivi pourtant les autres. Même, devant une maison aux persiennes closes, Philippe avait dit à Bernard :

— Je parie que tu n’auras pas le courage de sonner.

Le respect humain du jeune garçon avait surmonté sa honte, mais dès que la porte s’était ouverte, il était revenu à ses camarades :