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LA FOLLE EXPÉRIENCE

Enfin, par un dernier mouvement, le docteur remit en place sa mécanique.

— Aux genoux du bon sens, plions cet art rebelle… C’est ce que disait en un bon vers le Père Delaporte, un des bons écrivains de notre temps…

Quand il ne citait pas le Coran, le docteur Marquette citait des écrivains inconnus, qu’il plaçait très haut. Philippe s’aperçut bientôt que la culture de son nouvel ami était fort vaste et disparate encore plus. Rarement citait-il des modernes, et plus rarement encore des classiques : ce n’était pas dédain, c’était que le docteur avait ses classiques et ses modernes à lui. Son romancier préféré était Rabusson et son poète Albert Mérat, si bien que Philippe, croyant d’abord à quelque blague, dut vérifier les noms dans les dictionnaires et anthologies : Philippe croyait que le docteur mettait sur le dos des autres ce qu’il inventait. En médecine, il citait toujours un certain docteur Catto, du ton dont on aurait nommé Claude Bernard ou Metchinikoff.

À terre, s’empilaient dans les coins, sur le rebord de la fenêtre, sous le lit, la commode, la toilette, s’empilaient revues et journaux, liés par des ficelles :

— J’ai du pain sur la planche, comme vous voyez… L’Ecclésiaste dit : « Mieux vaut vivre à deux que solitaire. » Il y a pour les deux un bon salaire dans leur travail… Ma moitié, à