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LA FOLLE EXPÉRIENCE

choisis le plaisir le plus vif, je ne me soucie pas du moi de demain. Je suis logique… »

Mais Philippe n’osait pas s’expliquer ainsi. Il perdait tous ses moyens, parce que Lucien, partant, le blessait. De plus, il avait honte de le suivre, il se sentait de trop, mais il fallut que la dépression commençât à le prendre pour qu’il se décidât à lâcher prise.

— Je te reverrai samedi, je te laisse ici.

Philippe s’en voulait de ce mot qui lui était échappé : « Lucien s’aperçoit bien que je ne le vois que pour le taper. Dieu que je suis fatigué de cette vie ! » Lucien répondait, du reste :

— Ce n’est pas sûr, essaie ailleurs, mais je ferai mon possible pour te donner ce que je pourrai. Surtout, prends sur toi, ne fais pas le fou.

Philippe était déjà parti. Mais il ne savait où aller si tôt. Il y avait déjà des passants dans la rue et plus de voitures. Philippe aperçut même un camion de Langlais, ce richard qu’il avait connu au collège, le méchant type[1] : « Je n’y pensais pas, je pourrais peut-être avoir quelques dollars de lui, en le prenant par sa vanité, et en lui contant des rosseries… »

Il était devant une église. Philippe entra, désœuvré. Au sanctuaire, un prêtre marmottait une messe. Des dévotes et des petits vieux perdus dans cette nef obscure. Philippe observait

  1. Le Mariage blanc d’Armandine.