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midi, et monsieur Lapointe ne le revoyait qu’à la nuit.

Paul avait sa clé et monsieur Lapointe n’osait se lever, malgré son envie : « Il a peut-être besoin de quelque chose… Il n’a pas mangé, je suis sûr… Il est trop fier pour demander ». Cependant, il l’entendait qui fourrageait dans le garde-manger.

Puis ce fut la fuite définitive. Il reçut une lettre timbrée du Manitoba : « Je suis marié. Je reviendrai peut-être l’année prochaine. Des saluts. » Monsieur Lapointe, dans sa peine, fut heureux pourtant : « Il pense à m’écrire. Il lui reste encore du naturel… Il n’est pas mauvais au fond. Il reviendra. On revient toujours à son berceau, comme disait le père Pinault… »

Paul ne revint pas. Celui qui revint, ce fut le petit Eddy.

Ce fut bien machiné. Monsieur Lapointe, six mois après le départ de Paul, au moment que, désespéré, sa timidité se résignait à implorer l’assistance des hommes influents, ses confrères de classe, reçut une lettre. On l’implorait, on lui demandait l’aide de quelques dollars. Monsieur Lapointe relut la lettre dix fois, il