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— Je suis pas pour tout faire… Tu vas laver la vaisselle, d’abord, pour qu’elle traîne pas. Ensuite, tu mangeras ce qui reste… Si c’est pas assez chaud, tu feras chauffer.

— Tu sais ben que oui, ma femme.

— Tu feras attention au gaz : je veux pas des comptes impossibles.

Lorsque je quittais la maison avec Maurice, je n’avais qu’à me retourner pour le voir qui nous regardait partir, à demi caché par le rideau. Madame Godin était là aussi, et, une fois, je la surpris, qui repoussait son mari :

— Tu prends toute la place, avait-elle dit sans doute.

Une autre fois, elle vit que je la voyais, et j’eus honte pour elle, lorsque, subitement, le rideau se rabattit.


Je pressentais qu’un jour ces pauvres gens vivraient un drame à leur mesure. Maurice me le conta, au sortir d’une retraite fermée, qu’il fit alors, non par piété ni par remords, mais parce qu’il ne savait où percher, incapable qu’il était, dans sa colère, de demeurer à la maison de ses parents. Il me parlait avec une haine et une exaltation telles que j’en perdais la moitié de