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prières, ayez pitié de Clara, qui se conduit mal… » La litanie continuait. Je ne faisais plus oraison, mais exercice de patience. C’est qu’Armandine continuait de jongler dans l’église, jongler, cette inquiétude de la pensée timide. Même silencieuse, ses lèvres remuaient toujours. Elle jonglait tout le temps.

Ce soir-là, je ne pus hélas ! entendre les prières d’Armandine, cet épithalame singulier. Pauvre Armandine ! Aurais-je pourtant le courage de la plaindre ? Était-elle si pitoyable ? Ce jour entre les jours, elle avait les yeux plus grands que la panse. Elle exagérait et voulait cumuler, partager un héritage avec Ferdinand. Il n’y avait pas si longtemps, elle en avait reçu un autre. Ce n’était pas grand’chose, mais assez pour vivre à ne rien faire. Par malheur, des êtres comme Armandine ne peuvent rester à ne rien faire. Elle n’aurait pas été femme autrement, elle avait voulu être comme les autres. Son père mort, elle avait voulu travailler. Parce qu’elle possédait sa petite assurance, elle aurait à coup sûr pu attendre, mais elle pensait au lendemain. Elle s’était mise dans la couture. Elle n’aurait pas travaillé, elle, pour s’habiller : elle travaillait pour être propre. Le