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le chemin de fer l’achetait, payant le triple. Alors, fidèle à son vieux rêve, Arthur s’était mis dans les stocks, il avait vendu, il avait racheté, toujours heureux. Pour se vouer tout entier aux spéculations boursières, il se défit de son épicerie. Maintenant, il passait le plus clair du jour chez les courtiers. Sa vie était tracée. Ce n’est pas qu’il risquait beaucoup, non, toujours des petits montants, et toujours dans des entreprises différentes. S’il y avait quelque perte, et c’était rare, les gains compensaient. Arthur Pesant était heureux.


Il vivait au rez-de-chaussée d’un immeuble qu’il avait acheté entre temps, faisant lui-même son ménage et sa cuisine. Chaque année, deux jours, il recevait la visite de sa sœur établie dans l’Ontario, mariée et sans enfants : pour son frère du Manitoba, il n’en recevait des cartes que de loin en loin. Il avait fait, comme il disait, des arrangements avec elle. Il lui fournissait le logement pendant son séjour : elle aurait à sa charge les frais de nourriture. Le premier soir, il lui accordait une partie de cartes. Il n’aimait pas ça, mais il faut se sacrifier pour faire plaisir aux autres.