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ont été tracés par des hommes sans art ; les rhéteurs de la turbulente Alexandrie, de la Grèce dégénérée, n’ont point passé par là. Beaucoup de redites, de répétitions, de simplicités, mais des détails touchants et naïfs, des images gracieuses, des miracles que l’on peut considérer comme des paraboles ingénieuses, parfois des morceaux vraiment grandioses et relevés. Le cantique dans lequel sainte Anne, devenue mère après une longue stérilité, célèbre le bonheur qu’elle éprouve, est sublime d’exaltation et de pieux entraînement.

Citons encore la seconde portion de l’évangile de Nicodème comme une excursion des plus remarquables dans les domaines de l’enfer, dans de mystérieuses et inaccessibles régions ; l’auteur du Paradis perdu et celui de la Messiade s’en sont inspirés. Dans cette légende, ainsi que le remarque fort bien M. Douhaire, l’ampleur et l’éclat du récit atteignent à l’épopée, et l’on trouverait difficilement des scènes plus hardies de conception, d’une forme plus dramatique et plus vigoureuse, que cette solennelle confrontation des deux mondes, l’ancien et le nouveau, que cette vérification de la prophétie par les prophètes eux-mêmes, que ce réveil d’une génération de quatre mille ans au bruit de la voix perçante qu’elle avait entendue dans de surnaturelles communications. « Guidé par une imagination ardente, » observe M. Hase, « l’auteur a imité les couleurs sombres de l’Apocalypse. Se conformant à quelques traditions orientales ou gnostiques, il distingue le mauvais principe personnifié, du prince des enfers, le-