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Il lui a mis la corde au poing, et jure qu’elle n’est plus sienne.

« Ami, tu viens d’agir sagement, répond le curé dom Constant qui toujours est d’humeur à prendre. Retourne en paix, tu as bien fait ton devoir. Si tous mes paroissiens étaient aussi sages que toi, j’aurais du bétail en abondance. »

Le vilain quitte le prêtre qui commande aussitôt qu’on fasse, pour l’apprivoiser, lier Blérain avec Brunain, sa propre vache.

Le curé les mène en son jardin, trouve sa vache, puis les attache l’une à l’autre. La vache du prêtre se baisse, car elle voulait paître. Mais Blérain ne le veut pas, et tire la corde si fort qu’elle entraîne l’autre dehors, et la mène à travers maisons, champs et prés si bien qu’elle revient enfin chez elle, avec la vache du curé qu’elle avait bien de la peine à tirer.

Le vilain regarde, la voit, et en a grande joie au cœur.

« Ah ! dit-il alors, ma chère, il est vrai que Dieu donne au double. Blérain revient avec une autre. C’est une belle vache brune. Nous en avons donc deux au lieu d’une. Notre étable sera petite ! »

Par cet exemple, ce fabliau nous montre que fou est celui qui ne se résigne pas. Le bien est à celui qui Dieu le donne et non à celui qui le cache et l’enfouit. Nul ne doublera son avoir sans grande chance. C’est par chance que le vilain eut deux vaches, et le prêtre aucune. Tel croit avancer qui recule.