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ACTE I. 255

dans ces climats ou ailleurs ? répondez. '*'

Créon

Laïus partit pour aller, disoit-il, consulter l'Oracle, & depuis il n’a plus reparu.



'*' "II faut absolument que dans tous les " incidens qui composent la Fable, il n’y ait " rien qui soit sans raison, ou si cela est " impossible on doit faire ensorte que ce qui " est sans raison se trouve toujours hors de la " Tragédie, comme Sophocle l'a sagement " observé dans son Oedipe. " Arist. Poët. chap. 16. Sur quoi M. Dacier dit: "II étoit " sans raison qu'Oedipe eût été si long-tems " marié avec Jocaste, sans avoir sçu de quelle " manière Laïus avoit été tué, & sans avoir " fait une recherche exacte de ce meurtre. Mais " comme ce sujet qui est d’ailleurs le plus " beau du monde ne pouvoir subsister sans " cela, Sophocle n’a pas laissé de l’employer, " & il l’a mis sagement hors de l’action qu’il " a prise pour le sujet de la pièce. Cet incident " y est rapporté, comme une chose déjà faite " & qui a précédé le jour de l’action. Le Poëte " n’est responsable que des incidens qui entrent " dans la composition de son sujet, & non pas " de ceux qui le précédent ou qui le suivent. " Il me semble que c’est là jetter de la poussière aux yeux pour excuser un défaut visible, quoique nécessaire. J’aime mieux croire qu’Aristote loue Sophocle d’avoir sauvé ce défaut du mieux qu’il a pu, en le rendant en quelque sorte si étranger à son action, qu’on ne s’avise pas de l’y trouver sans y réfléchir.