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On rencontre encore le décasyllabe coupé en deux hémistiches de 5 syllabes chacun :

 1xx 2xx3xxx4xx5xxxxx 6xxxx7xxx 8xx 9xx 10
Si quelque méchant | vous blesse ou vous nuit,
Si grande que soit | son impertinence…

15. L’ennéasyllabe, ou vers de 9 syllabes (composé de 3 et de 6 syllabes) est peu employé[1]. On ne rencontre guère cette mesure que dans de petits sujets lyriques destinés à être chantés :

x1xx 2xx3xxx 4xx 5x6xxx7x 8x 9
Des destins | la chaîne redoutable
Nous entraîne | à d’éternels malheurs ;
Mais l’espoir | à jamais secourable
De ses mains | viendra sécher nos pleurs.

16. Le vers de 8 syllabes, ou octosyllabe, est l’un des plus anciens mètres : les trouvères et les troubadours en firent un usage constant dans les romans, les contes, les fabliaux ; il convient particulièrement au genre léger, gracieux et attendrissant. N’étant plus soumis (ainsi que les suivants, d’ailleurs) à l’obligation du repos, ou césure, il acquiert une grande liberté d’allures :

 1 x2xx3xxx 4xx 5xx 6x7x8
Il marchait d’un pas dégagé
Et faisait sonner sa sonnette.

On l’unit fréquemment à l’alexandrin pour former des distiques (réunion de deux vers).

17. L’heptasyllabe, ou vers de 7 syllabes, a de nombreux points de contact avec le précédent, qu’il concurrence heureusement dans de mul-

  1. La césure en deux parties inégales produit dans ces mètres une allure en quelque sorte boiteuse. Ce fait, déjà signalé à propos de l’endécasyllabe, explique sans doute la défaveur qu’a montrée à l’égard des vers à césure inégale le public littéraire, défaveur qui n’est point nouvelle au reste, particulièrement pour les vers de 9 syllabes. Las Flors del Gay Saber, cité plus haut, parlant des ennéasyllabes, remarque qu’ « on n’en doit point faire, car ils n’ont point une consonance agréable, à moins qu’ils n’aient un repos avec consonance à la 5e ou 6e syllabe. Et encore, même avec cela, c’est à peine si leur cadence ne déplaît pas, excepté quand les rimes sont multipliées ». — Rapin, Jean Passerat, Baïf, Étienne Pasquier se sont essayés non sans succès au vers de 11 syllabes. — On attribue à Malherbe la facture, en mètres de 11 syllabes, d’une chanson délicieuse. — Scarron, Voltaire, puis Béranger, et, enfin, plus près de nous, Th. de Banville, dans le genre satirique, ont usé du vers de 11 syllabes. — Verlaine a tenté de rénover tous les vers de mètres impairs, notamment ceux de 9, 11 et aussi 13 syllabes. — Il n’est donc point inutile de les mentionner, au même titre que les vers de rythmes différents. Aussi faut-il s’étonner de la remarque de M. Jean Dumont, disant dans la deuxième édition de son Vade-Mecum du Typographe (p. 97) ; « Les vers de 11 et de 9 pieds sont inusités. »