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LES CORRECTEURS A PARIS
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Un autre collaborateur de Henri Estienne fut Simon de Colines, né aux environs de Paris (Gentilly ou Pont-de-Colines), vers l’an 1470 ou 1480. En 1521, il épousait en troisièmes noces Guyonne Viart, déjà successivement mariée à Jean Higman et à Henri Estienne, et prenait la direction de l’imprimerie fondée, en 1489, par Higman, à l’enseigne des Lions.

Colines était un érudit remarquable ; sa maison fut le rendez-vous des savants dont il imprimait les œuvres et dont il surveillait lui-même la correction. En relations constantes avec Geoffroy Tory, et certainement sous son inspiration, de Colines proscrivit de ses éditions le caractère gothique, améliora les types romains en usage et, le premier à Paris[1], utilisa l’italique comme « caractère de texte ». Ses éditions grecques, pour lesquelles il fit, au début, graver un type spécial, sont d’une beauté et d’une correction admirables. Nombre des livres sortis de ses presses sont du format in-16 dont il contribua à vulgariser l’emploi.

D’après Gabriel Naudé[2], « ce fut un nommé Gilles Gormont[3] qui, le premier, établit à Paris, environ l’an 1507, une imprimerie pour les autheurs grecs[4], commençant par la Grammaire de Chrysoloras, la Batrachomyomachie d’Homère, le poème d’Hésiode intitulé Opera et Dies, et quelques autres petits traittés, qui finissent tous par ce dicton latin : Operoso huic opusculo extremam imposuit manum Ægidius Gourmontius, integerrimus ac fidelissimus primus, duce Francisco Tissardo Ambacæo, græcarum litterarum Parisiis impressor, anno Domini M. CCCCC. VII. »

Quel était ce François Tissard, d’Amboise (Ambacæo), dont l’érudition était assez forte pour assumer la direction (duce) des impressions grecques de l’atelier de Gourmont : préparation du manuscrit,

  1. Nous disons à Paris, car, ainsi qu’on le verra plus loin (p. 60 et suiv.), dès les derniers mois de 1502, Balthazard de Gabiano avait imprimé à Lyon, en caractères « aldins » (italiques), une contrefaçon des éditions des auteurs classiques d’Alde Manuce.
  2. Gabriel Naudé, Addition à « l’Histoire de Louis XI », chap. vii, 1630, Paris (chez François Targa).
  3. G. Naudé écrit « Gormont », alors que le texte latin rapporté plus loin donne Gourmontius.
  4. En Italie, la typographie, sous la direction des Hellènes réfugiés de Constantinople, avait déjà mis au jour de nombreuses éditions grecques.