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Nos ancêtres — des maîtres au renom immortel, il est vrai — ne traitaient point la correction, et par suite le correcteur, avec un tel dédain. Pour en donner une preuve manifeste, il nous suffira de rappeler ce qu’était la « chambre des correcteurs » à l’imprimerie Plantin :

« Nous[1] voici dans la chambre des correcteurs, l’une des plus belles du Musée, l’une des plus complètes au point de vue des choses qu’elle contient.

« Plus longue que large, d’un magnifique aspect, cette chambre est l’une des plus grandes de la maison Plantin et peut être certainement considérée comme l’un des joyaux du Musée… Toutes choses ont été laissées à leur place ; tout vous parle des grands travailleurs dont le nom est inséparable de la gloire des Plantin, et qui ont passé là tant d’années, ardents à des labeurs incessants.

« À droite, en entrant, nous trouvons un énorme bahut rempli de lettres, d’épreuves, de manuscrits… Puis, plus loin, le bureau des correcteurs, véritable merveille d’art en chêne sculpté. Ce bureau se compose d’une grande table dont l’un des côtés est appuyé à la muraille ; sur les deux côtés perpendiculaires au mur, des bancs avec dossiers très hauts ornés de sculptures. Les sièges sont assez élevés au-dessus du plancher, et il faut monter une marche pour y avoir accès. Sous la table se trouvent des rayons en assez grand nombre. Cette table reçoit directement le jour par une fenêtre avec volets se fermant à l’intérieur…

« À l’un des dossiers se trouve suspendue une paire de ciseaux de taille respectable. Dans une boîte placée sous la table, nous feuilletons des cahiers sur lesquels sont inscrites les correspondances, dans un ordre et une régularité parfaits ; sur la table, une petite balance fort curieuse pour le pesage des lettres, et dont le modèle remonte au xviiie siècle…

« Tout le reste de la chambre des correcteurs est occupé par des armoires et rayons garnissant le mur de haut en bas, et dans lesquels sont alignés dans l’ordre le plus parfait des paquets de caractères divers…

« Au milieu de la chambre des correcteurs se trouve une table sans tiroir, couverte de feuilles d’impression, d’épreuves en placards, sur lesquelles nous avons relevé de nombreuses corrections. Devant cette

  1. La Maison Plantin, à Anvers, par Léon Degeorge, 3e éd., 1886, p. 55.