Page:Brossard - Correcteur typographe, 1924.djvu/509

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dites ; … les metteurs en pages imposaient[1], c’est-à-dire disposaient dans les formes les paquets de composition exécutés par les cassiers » ; parfois cependant un « compagnon cumulait les deux fonctions[2] » du cassier et du metteur.

Le genre de salaire et l’époque de son paiement subirent maintes modifications : la rémunération avait lieu pour une part en argent, pour le reste en nature, « feu, lict, hostel et lumière », ou simplement « pain, vin et pitance » ; en 1571, un édit auquel, semble-t-il, maîtres et compagnons apportèrent d’eux-mêmes pendant quelque temps maintes dérogations, ordonna que le salaire en argent serait désormais d’usage général. Le règlement des salaires fut d’abord peut-être annuel ; plus tard, il eut lieu à époques indéterminées, à l’achèvement du travail ; ensuite il devint mensuel, puis bimensuel et, enfin, hebdomadaire.

Le taux de la rémunération des compagnons en conscience n’est que fort rarement mentionné dans l’énorme fatras de documents concernant notre profession qui nous est parvenu. « Si l’on relève avec minutie tous les ouvrages publiés par les moindres imprimeurs au xve et au xvie siècle, l’on ne s’est jamais demandé quelle était la situation de ceux qui faisaient ces livres, quelles étaient leurs aspirations, quel était leur salaire[3]. » Lorsque, en 1539, après les grèves de Lyon et les demandes des maîtres imprimeurs parisiens, les rois commencèrent à légiférer sur le « faict de l’imprimerie », l’obscurité de la question qui nous occupe s’illumine de quelques rayons de lumière ; mais « c’est à peine si dans les manuscrits, si dans les actes notariés ou publics, nous trouvons une trentaine d’indications de salaires. Sous l’ancien régime, l’ouvrier est trop bas dans l’échelle hiérarchique de la société pour attirer l’attention des économistes. On ne s’en préoccupe pas, et on n’en tiendra compte que lorsqu’il s’imposera à l’attention en se soulevant[4] ».

Le salaire du « travail aux pièces », à la tâche plutôt, n’était point

  1. Il est évident que les metteurs en pages devaient, outre la distribution de la copie et l’imposition, effectuer sur le plomb, et avant lecture, une sorte de vérification de la mise en pages ; on sait que les compositeurs aux pièces étaient tenus, d’après les conditions du contrat de travail, d’exécuter le travail par feuille, c’est-à-dire en feuille.
  2. D’après L. Radiguer.
  3. P. Mellottée, Histoire économique de l’Imprimerie, t. I, p. 309.
  4. Id., Ibid., p. 310.