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c) Enfin, on l’a déjà dit — mais il est bon de l’affirmer à nouveau, à l’encontre des idées de certaines Maisons — le teneur doit être au courant des choses de l’imprimerie.

IV. La lecture doit être faite posément, sans hâte, afin de donner au correcteur le temps d’effectuer convenablement les corrections qu’il rencontre et de ne point l’obliger à une course préjudiciable à une bonne exécution du travail. La qualité de la correction ne saurait valoir par le nombre de kilomètres verbeux parcourus ; elle se déduit d’autres faits. Quantité et qualité sont deux mots qui parfois s’accordent mal ensemble, surtout dans le sujet qui nous occupe.

Le teneur parle à voix moyenne : rien ne sert de crier à haute voix ; il faut cependant éviter de tomber dans l’excès contraire, car ces deux défauts ont un résultat analogue de fatigue vocale et auditive. Le teneur articule clairement chaque mot et, particulièrement, chaque nom propre ; il épèle les termes d’orthographe difficile, surtout ceux d’origine étrangère, et les expressions locales (patois) ; il signale les modifications que nombre de personnes apportent parfois aux appellations familiales ou personnelles : Henry au lieu de Henri ; Briand, Briant, Bryant ; Hélène, Hélaine ; Madeleine, Magdeleine, Madelène, etc. ; il fait sentir les différences de genre et de nombre, ainsi que les temps des verbes quand il peut y avoir doute ; il indique la valeur de chaque ponctuation par un repos de durée variable ; il signale à l’attention du correcteur les accidents du discours ou les caractères étrangers au texte de l’ouvrage : parenthèses, tirets ou moins, guillemets, italiques, égyptiennes, etc.

Le teneur de copie est ainsi l’intermédiaire, l’organe intelligent, à l’aide duquel le correcteur, dont l’attention est exclusivement consacrée à l’examen de l’épreuve, peut cependant lire directement le manuscrit reproduit et saisir les moindres incidents de son texte.

La manière d’agir de M. P. Didot nous est, d’ailleurs, en cette matière, au dire de Frey, un exemple remarquable : « Nous savons que M. Didot s’enfermait, pour faire ses lectures, dans un cabinet retiré dont les appartements voisins étaient inhabités ou silencieux ; là, au milieu d’une bibliothèque nombreuse, il lisait debout, à haute voix, articulant assez nettement pour que sa vue pût distinguer les lettres une à une ; une personne qui lui était bien chère suivait atten-