Page:Brossard - Correcteur typographe, 1924.djvu/289

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ateliers est assez élevé ; bien plus considérable est le chiffre des vade-mecum ou des mémentos particuliers. Sur ce point, le compositeur pourrait, sans doute, n’avoir que l’embarras du choix, si tous ces opuscules étaient d’égale valeur. Malheureusement, il semble bien que la qualité de ces travaux est aussi différente que leur disparité est indiscutable. Il suffit d’avoir étudié et raisonné quelques-uns de ces volumes pour en être persuadé[1].

Th. Lefevre, E. Leclerc, E. Desormes, G. Daupeley-Gouverneur, J. Dumont, pour ne citer que ces quelques auteurs, n’eurent jamais soin de se persuader du bien-fondé des principes posés ou de raisonner les préceptes édictés. Les uns et les autres ont « légiféré », sans souci du voisin ou du prédécesseur, chacun pour eux-mêmes ; suivant leur éducation première, ils ont promulgué « articles de foi » et leurs erreurs et leurs préférences en même temps que les usages locaux ou nationaux. Et l’on assiste à cet étrange spectacle d’une règle scrupuleusement appliquée ici que l’on réprouve ailleurs à l’instar d’une hérésie typographique, d’une habitude que l’on tolère en cet endroit alors que là elle est rigoureusement bannie, enfin d’un artifice que l’on accepte dans telle imprimerie et que l’on repousse dans un autre atelier. Le correcteur — et encore plus le compositeur — se perd au milieu de ce dédale d’exceptions et de particularités dont parfois il fut longtemps sans se soucier ou même sans prévoir les incommodités, mais dont il éprouve les désagréments au premier changement de Maison.

Cette situation profondément regrettable et préjudiciable aux intérêts bien compris du typographe, du maître imprimeur et de la clientèle, a sollicité, il y a quelques années, l’attention d’un certain nombre de professionnels épris de leur art.

Au cours de l’année 1906, semble-t-il, un groupe de protes et de correcteurs bordelais faisant partie de la Société amicale des Protes et Correcteurs d’Imprimerie de France avait exprimé le désir de voir leur Société prendre « l’initiative de la création d’un Code typogra-

  1. V. Breton disait à ce sujet (Circulaire des Protes, no 158, avril 1909) : « Ce ne sont pas les manuels qui manquent. Il y en a plutôt trop, et chaque auteur a pour ainsi dire sa manière de voir sur certains cas particuliers, ce qui ne laisse pas que de jeter l’indécision parmi ceux qui se trouvent en présence d’affirmations différentes d’auteurs également autorisés. »