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favoriser pour son plus grand bénéfice, mais encore, les ayant reconnues et appréciées, ne tarde pas, il faut le croire, à récompenser à leur juste valeur.


III. — Relations du correcteur
avec ses collègues
.teur


Mais ce n’est pas seulement avec les ouvriers que le correcteur doit avoir des rapports empreints de la plus grande cordialité et d’une réelle urbanité ; c’est encore, c’est surtout, lorsque le service de la correction comprend un certain nombre de titulaires, avec ses collègues.

Trop souvent, parce qu’ils ne savent ou ne veulent se rendre compte, les patrons négligent d’établir dans ce service une sorte de hiérarchie ; trop souvent, pour des raisons blâmables le prote fait osciller, tantôt à l’égard de l’un, tantôt à l’égard de l’autre, la balance de son favoritisme. Le travail agréable, facile, est l’apanage exclusif de celui-ci ; son voisin est comme empoisonné de manuscrits de digestion lourde et pénible ; mainte lecture de bon à tirer est toujours urgente, cependant que nombre de revisions dorment sur la table du préféré.

Alors chacun de ces lettrés se constitue pour lui seul une manière d’agir qui, pense-t-il, l’élève bien au-dessus de son confrère ; les uns vont, viennent, corrigent, étudient sans souci des autres : chaque « pupitre » veut ignorer le « pupitre » qui le côtoie ; si l’un de nos intellectuels rencontre en son semblable quelque similitude d’idées au point de vue travail, ce ne sera point chez un de ses collègues. Mais cette attitude d’indifférence mutuelle ne saurait se soutenir longtemps ainsi : pour certains, l’ignorance voulue fait bientôt place à un sentiment de jalousie confuse, puis de sourde hostilité, et alors l’anarchie survient rapidement avec toutes ses conséquences regrettables.

La préparation des manuscrits est rendue illusoire par un correcteur de premières dont les idées ne cadrent point avec celles du reviseur : parce que ce dernier est voisin du prote, parce qu’il reçoit directement les ordres du chef, parce qu’on lui fait parfois