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heures je vous reconduirai en me promenant jusqu’au presbytère. Voulez-vous ? »

Elle fit de la tête un signe d’assentiment, et la joie étincela dans ses yeux.

Moore resta encore deux minutes : il se pencha sur le pupitre de Caroline et jeta un coup d’œil sur sa grammaire ; il prit sa plume et joua avec son bouquet ; son cheval piaffait d’impatience ; Frédéric Murgatroyd toussait violemment à la porte, s’étonnant de ce que son maître pouvait faire.

« Au revoir ! » répéta Moore, et il s’éloigna rapidement.

Hortense, entrant dix minutes après, trouva, à sa grande surprise, que Caroline n’avait pas encore commencé ses exercices.




CHAPITRE V.

Coriolan.


Mlle Moore avait ce matin-là une élève fort distraite. Plusieurs fois Caroline oublia les explications qui venaient de lui être données. Cependant elle supportait avec une inaltérable sérénité les réprimandes que lui attirait son inattention. Assise au soleil près de la fenêtre, elle paraissait recevoir, avec la chaleur de l’astre, une bienfaisante influence qui la rendait à la fois heureuse et bonne. Dans cette disposition d’esprit, Caroline paraissait avec tous ses avantages ; elle était alors charmante et agréable à voir.

Le don de la beauté ne lui avait pas été dénié. Il n’était pas absolument nécessaire de la connaître pour l’aimer ; elle était assez bien pour plaire à première vue ; sa taille convenait à son âge ; elle était enfantine, légère et flexible ; chaque courbe était nette, chaque membre proportionné : son visage était gracieux et expressif ; ses yeux étaient beaux, et lançaient par moments des rayons qui allaient irrésistiblement au cœur, avec un langage qui parlait doucement aux affections ; sa bouche était très-jolie ; elle avait la peau délicate, et de magnifiques cheveux qu’elle savait arranger avec goût. Les boucles, dont elle avait une profusion toute pittoresque, encadraient merveilleusement