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mon plein gré que j’avais accepté la place : je m’étais créé toutes ces tribulations, et j’étais décidée à les supporter ; bien plus, je n’avais aucun regret de ce que j’avais fait. Je désirais montrer à mes amis que j’étais capable d’entreprendre la tâche, et déterminée à m’en acquitter honorablement jusqu’au bout ; et, s’il m’arrivait de trouver trop dégradant de me soumettre si tranquillement, ou intolérable de lutter si constamment, je me tournais alors vers ma maison et me disais à moi-même : « Ils peuvent t’écraser, ils ne te dompteront pas ; c’est à toi que je pense, et non à eux. »

Vers Noël, il me fut permis de faire une visite à mes parents ; mes vacances ne furent que d’une quinzaine : « Car, dit mistress Bloomfield, je pense qu’ayant vu vos parents si récemment, vous ne tenez pas à faire au milieu d’eux un long séjour. » Je me gardai bien de la détromper ; mais elle ne pouvait s’imaginer combien ces quatorze semaines d’absence avaient été ennuyeuses pour moi, avec quelle anxiété j’attendais mes vacances, et quel fut mon désappointement de les voir écourtées. Pourtant, elle n’était nullement à blâmer en ceci ; je ne lui avais jamais dévoilé mes sentiments, et ne pouvais espérer qu’elle les devinât. Je n’avais pas demeuré avec elle un terme entier, et elle avait le droit de ne pas m’accorder des vacances entières.




CHAPITRE IV.

La grand’mère.


Je fais grâce à mes lecteurs du récit de ma joie en revoyant la maison paternelle, du bonheur dont je jouis pendant les quelques jours de repos ou de liberté que je passai dans ce cher séjour parmi ceux que j’aimais et dont j’étais aimée, et du chagrin que j’éprouvai lorsqu’il me fallut leur dire un long adieu.

Je retournai pourtant avec courage à mon œuvre, tâche plus ardue que vous ne pouvez l’imaginer si jamais vous n’avez été chargé de la direction et de l’instruction de ces petits re-