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— Puis encore ?

— Je suis heureuse que nous soyons amis.

— Vous et moi ?

— Oui, une fois j’ai pensé que nous ne le serions jamais.

— Cary, je veux vous dire quelque jour une chose qui n’est pas à mon avantage, et conséquemment ne vous fera pas plaisir.

— Ah ! ne la dites pas ! je ne pourrais supporter d’être obligée de penser mal de vous.

— Et moi je ne puis supporter que vous pensiez de moi mieux que je ne le mérite.

— Bien ; mais je sais à moitié votre « chose ; » et vraiment, je crois que je la sais tout entière.

— Vous ne la savez pas.

— Je crois la savoir.

— Quelle personne concerne-t-elle avec moi ? »

Elle rougit, elle hésita, elle garda le silence.

« Parlez, Cary ! qui concerne-t-elle ? »

Elle essaya de prononcer un nom, elle ne le put.

« Dites-le-moi : il n’y a ici que nous deux ; soyez franche.

— Mais si j’ai mal deviné !

— Je pardonnerai ; dites-le-moi à voix basse, Cary. »

Il inclina son oreille près de ses lèvres ; cependant elle ne voulut ou ne put parler. Voyant que Moore attendait et était résolu d’entendre quelque chose, elle dit enfin :

« Miss Keeldar a passé un jour à la rectorerie. La soirée étant devenue très-mauvaise, nous lui avons persuadé de rester toute la nuit.

— Et vous et elle avez frisé vos cheveux ensemble ?

— Comment savez-vous cela ?

— Et alors vous avez causé ; et elle vous a dit…

— Ce n’est pas dans le temps où nous frisions nos cheveux ; ainsi, vous n’êtes pas aussi clairvoyant que vous le pensez ; et, en outre, elle ne me l’a pas dit.

— Vous avez ensuite couché ensemble ?

— Nous avons occupé la même chambre et le même lit. Nous n’avons pas dormi beaucoup ; nous avons causé toute la nuit.

— J’en jurerais ; et alors elle vous a dit la chose… Tant pis ! J’aurais préféré que vous l’eussiez apprise de moi.

— Vous êtes tout à fait dans l’erreur : elle ne m’a pas dit ce