— Il me l’a faite.
— Vous l’avouez ?
— Je l’avoue. Maintenant, continuez ; regardez ce point comme établi.
— Il vous a fait cette offre le soir où nous avons dîné au prieuré.
— Il suffit de vous dire qu’il l’a faite ; continuez.
— Il vous l’a faite dans le petit réduit, dans la chambre qui a été une galerie de tableaux, que sir Monkton convertit en salon ? »
Pas de réponse.
« Vous examiniez tous deux une armoire : je vis tout ; ma sagacité ne fut point en défaut, elle ne l’est jamais. Plus tard, vous avez reçu de lui une lettre. Sur quel sujet ? de quelle nature était son contenu ?
— Peu importe.
— Madame, est-ce là la manière dont vous me parlez ? »
Shirley frappait le tapis à coups redoublés avec son pied.
« Vous voilà silencieuse et irritée, vous qui m’avez promis de sincères réponses !
— Monsieur, je vous ai répondu jusqu’ici ; continuez.
— J’aimerais à voir cette lettre.
— Vous ne pouvez la voir.
— Je dois la voir, et je la verrai, madame. Je suis votre tuteur.
— Ayant cessé d’être mineure, je n’ai plus de tuteur.
— Ingrate ! élevée par moi comme ma propre fille…
— Une fois de plus, mon oncle, ayez la complaisance de ne pas vous écarter de la question. Demeurons de sang-froid. Pour ma part, je n’ai nulle envie de m’emporter ; mais, vous le savez, une fois poussée dans certaines limites, je ne pèse guère ce que je dis. Je ne suis pas alors facile à arrêter. Écoutez ! Vous m’avez demandé si sir Philippe m’a offert sa main : j’ai répondu à cette question. Que voulez-vous savoir encore ?
— Je désire savoir si vous l’avez accepté ou refusé ; et je le saurai.
— Certainement, vous allez le savoir : je l’ai refusé.
— Vous l’avez refusé ! Vous, vous, Shirley Keeldar, refuser sir Philippe Nunnely ?
— Je l’ai refusé. »