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SHIRLEY.





CHAPITRE PREMIER.

Les vieux cahiers d’exercices.


À l’époque où les habitants de Fieldhead revinrent à Briarfield, Caroline était à peu près rétablie. Miss Keeldar, qui avait reçu par la poste des nouvelles de la convalescence de son amie, ne laissa pas une heure s’écouler entre son arrivée au manoir et sa visite à la rectorerie.

Une pluie douce et abondante tombait sur les fleurs tardives et sur les arbustes jaunis par l’approche de l’automne, quand on entendit s’ouvrir la porte du jardin, et l’on vit passer devant la fenêtre la forme bien connue de Shirley. À son entrée, elle montra ses sentiments à sa manière. Quand elle se trouvait profondément émue, par une crainte sérieuse ou par la joie, elle parlait peu. Rarement elle permettait à la plus forte émotion d’influencer sa langue, et souvent son œil même n’en était pas affecté. Elle prit Caroline dans ses bras, lui donna un regard, un baiser, puis lui dit :

« Vous êtes mieux. »

Puis une minute après :

« Je vois maintenant que vous êtes hors de danger ; mais prenez garde. Dieu, qui vous accorde la santé, n’entend pas peut-être qu’elle soit exposée à soutenir de nouveaux chocs. »

Elle continua à parler avec vivacité du voyage. De temps à autre son œil se dirigeait sur Caroline : on pouvait lire dans ce regard une profonde sollicitude, un peu de trouble et aussi d’étonnement.