guérir, elle défend ordinairement de s’exprimer, sous peine de son mépris : ce mépris est une espèce de manteau de clinquant qui recouvre sa faiblesse difforme. Les gens n’aiment pas qu’on leur rappelle des maux qu’ils ne peuvent ou ne veulent guérir ; car le sentiment de leur propre incapacité, ou de l’obligation où ils sont de faire des efforts qui ne leur plaisent pas, trouble leur quiétude et leur satisfaction d’eux-mêmes. Les vieilles filles, comme les pauvres sans asile et sans travail, ne doivent demander ni une place ni une occupation dans la société : cela trouble les heureux et les riches ; cela trouble les parents. Voyez les nombreuses familles de filles du voisinage : les Armitage, les Birtwhistle, les Sykes. Les frères de ces filles ont tous un commerce ou une profession ; ils ont quelque chose à faire. Leurs sœurs n’ont aucun emploi terrestre, si ce n’est le soin de la maison et la couture ; aucun plaisir terrestre, si ce n’est d’improfitables visites ; aucune espérance, dans toute leur vie à venir, de rien de meilleur. Cet état de stagnation fait décliner rapidement leur santé ; elles ne sont jamais bien portantes, et leur esprit et leurs idées se rétrécissent prodigieusement. Le grand désir, le seul but de chacune d’elles, est d’être mariée, mais le plus grand nombre ne le seront jamais. Elles mourront comme elles vivent maintenant. Elles passent leur vie à dresser des plans et à tendre des pièges pour attraper des maris. Les gentlemen les tournent en ridicule ; ils n’ont pas besoin d’elles et ne font d’elles aucun cas : ils disent, je les ai entendus plusieurs fois le dire avec un rire moqueur, que le marché matrimonial est encombré. Les pères disent la même chose et se mettent en colère lorsqu’ils remarquent les manœuvres de leurs filles : ils leur ordonnent de demeurer à la maison. Que veulent-ils qu’elles fassent à la maison ? Si vous le demandez, ils répondent : coudre et faire la cuisine : ils attendent qu’elles fassent cela, et cela seulement, de bon cœur, régulièrement, sans aucune plainte, pendant toute leur vie, comme si elles n’avaient aucun germe de facultés pour rien autre chose ; doctrine aussi raisonnable à soutenir que celle qui prétendrait que les pères n’ont aucunes facultés pour manger la cuisine que font leurs filles ou porter les vêtements qu’elles cousent. Est-ce que les hommes pourraient vivre ainsi eux-mêmes ? Ne seraient-ils pas bientôt fatigués ? Et, lorsqu’ils ne recevraient aucun soulagement dans leur fatigue, mais seulement des
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