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de quiconque subissait une mortification. Tartare fut renvoyé ; Pierre-Auguste fut calmé : car Shirley avait des regards et une voix qui eussent calmé un taureau furieux. D’ailleurs, il ne manquait pas de bon sens, et, puisqu’il ne pouvait provoquer le propriétaire du chien, ce qu’il avait de mieux à faire, c’était de se montrer poli. Il essaya d’être aimable, et ses avances étant bien accueillies, il devint tout à fait poli. Il était venu, d’ailleurs, dans l’intention d’être charmant et fascinateur. De fâcheux présages l’avaient accueilli dans sa première visite à Fieldhead ; mais, cet accident passé, il résolut de charmer et de séduire. Il était entré comme un lion, il voulut sortir comme un agneau.

Pour avoir de l’air, sans doute, ou peut-être pour sortir plus facilement si cela devenait nécessaire, il s’assit non point sur le sofa, où miss Keeldar lui offrit une place, ni au coin du feu, à côté de Caroline, qui l’y invita avec un geste amical et plein de bienveillance, mais sur une chaise auprès de la porte. N’étant plus sombre et furieux, il devint, selon son habitude, contraint et embarrassé. Il parla par accès et par boutades, choisissant pour sujet de sa conversation ce qu’il y avait de plus vulgaire ; il soupirait à chaque pause, et il soupirait même avant d’ouvrir la bouche. À la fin, voulant ajouter l’aisance à ses autres charmes, il appela à son aide un énorme mouchoir de poche en soie : c’était le gracieux joujou qui devait occuper ses mains oisives ; il se mit à l’œuvre avec une certaine énergie ; il plia en coin le carré jaune et rouge ; il le déplia en l’agitant ; il le plia de nouveau et en fit une belle bande. À quel usage voulait-il appliquer cette ligature ? En envelopperait-il son cou ou sa tête ? S’en ferait-il une cravate ou un turban ? ni l’un ni l’autre. Pierre-Auguste avait un génie inventif et original. Il allait montrer à ces dames des grâces qui avaient au moins le charme de la nouveauté. Il s’assit sur sa chaise avec ses athlétiques jambes irlandaises croisées, et dans cette attitude commode il passa le mouchoir autour de ses jambes et les attacha solidement. Il pensait évidemment que l’invention méritait les honneurs du bis, car il répéta plusieurs fois la même manœuvre. À la seconde fois, Shirley fut obligée d’aller à la fenêtre pour donner pleine liberté, sans être vue, à un rire qu’elle ne pouvait plus réprimer ; Caroline détourna la tête pour cacher le sourire qui égayait son visage. Miss Helstone s’amusait fort de la contenance de Pierre-Auguste. Elle était parfai-