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par son nom et le toucha à l’épaule ; mais le vieillard restait immobile, de sorte qu’il prit la chandelle et le regarda. Je vis bien qu’il y avait quelque chose qui allait mal quand il remit sa lumière sur la table et que, saisissant les enfants chacun par un bras, il leur murmura de monter, et de ne pas faire de bruit, ajoutant qu’ils auraient à dire leurs prières tout seuls ce soir-là, parce que lui-même avait autre chose à faire.

— Je veux auparavant dire bonne nuit à mon père, dit Catherine, lui passant les bras autour du cou avant que nous ayons pu l’en empêcher. La pauvre créature découvrit tout de suite le malheur ; elle gémit : « Oh, il est mort, Heathcliff, il est mort ! » Et tous deux se mirent à pleurer, le cœur brisé.

Je joignis mes sanglots aux leurs, amers et sonores, mais Joseph nous demanda à quoi nous pensions de hurler de cette façon sur un saint dans le ciel. Il me dit de mettre mon manteau et de courir à Gimmerton pour chercher le médecin et le curé. Je ne pouvais pas deviner à quoi servirait l’un ou l’autre dans ce moment ; pourtant, je partis, par le vent et la pluie, et je ramenai avec moi l’un des deux, le médecin ; l’autre dit qu’il viendrait dans la matinée. Laissant Joseph expliquer l’affaire, je courus à la chambre des enfants ; leur porte était entrebâillée, je vis qu’ils ne s’étaient pas couchés, bien qu’il fût passé minuit ; mais ils étaient plus calmes et n’avaient pas besoin de moi pour les consoler. Les petites âmes se réconfortaient l’une l’autre avec des pensées meilleures que toutes celles que j’aurais pu leur suggérer ; aucun curé dans le monde n’a jamais fait une aussi belle peinture du ciel que celle qu’ils en faisaient dans leur innocente conversation ; et pendant que je les écoutais en sanglotant, je ne pouvais m’empêcher de souhaiter que nous fussions tous ensemble en sécurité là-haut.