Page:Brontë - Un amant.djvu/55

Cette page a été validée par deux contributeurs.

fournaise et ses yeux, et semblait toute absorbée dans son occupation, ne s’arrêtant que pour gronder la servante de la couvrir d’étincelles, ou pour repousser de temps à autre un chien qui approchait son nez trop près de sa figure. Je fus surpris de voir que Heathcliff était là aussi. Il se tenait près du feu, me tournant le dos ; et je compris qu’il venait de faire une scène orageuse à la pauvre Zillah, celle-ci interrompant à tout moment son travail pour relever le coin de son tablier, et pour pousser des grognements irrités.

— Et vous ; vous indigne…, éclatait Heathcliff au moment où j’entrais, se tournant vers sa belle-fille, vous voilà encore avec votre paresse ! Tous les autres gagnent leur pain, et vous, vous vivez de ma charité. Mettez de côté ces balivernes, et trouvez quelque chose à faire. Je vous ferai expier la calamité de vous avoir toujours sous mes yeux, entendez-vous, maudite coquine !

— Je mettrai de côté mes balivernes, parce que vous pouvez me forcer à le faire si je refuse, répondit la jeune dame fermant son livre et le jetant sur une chaise. Mais quant à faire quelque chose, je ne ferai rien que ce qui me plaira, dussiez-vous en perdre la langue à force de jurer.

Heathcliff leva son bras, et la jeune femme, qui paraissait en connaître le poids, s’empressa de se mettre à l’abri. N’ayant aucun désir d’assister pour me distraire à une bataille de chat et de chien, je m’avançai d’un pas vif, comme si j’étais heureux de prendre ma part de la chaleur du foyer, et tout à fait ignorant de la dispute interrompue. Chacun d’ailleurs eut assez de tenue pour suspendre les hostilités. M. Heathcliff enfonça ses poings dans ses poches pour les garantir de la tentation ; Madame Heathcliff plissa ses lèvres et marcha vers un siège assez éloigné, où elle tint sa parole en jouant, pendant tout le