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— En aucune façon ! répondit Madame Linton. Je ne veux pas être nommée une seconde fois un chien au ratelier. Il faut que vous restiez ! Eh, bien, Heathcliff, pourquoi ne manifestez-vous pas votre satisfaction de mes agréables nouvelles ? Isabella jure que l’amour qu’Edgar a pour moi n’est rien en comparaison de celui qu’elle entretient pour vous. Je suis sûre qu’elle a dit quelque chose de pareil : n’est-ce pas, Ellen ? Et elle a refusé de manger depuis notre promenade d’avant-hier par rage de ce que je l’ai éloignée de votre société.

— Je suppose que vous la calomniez, dit Heathcliff tournant sa chaise de leur côté. En tous cas, ce qu’elle désire en ce moment, c’est d’être hors de ma société.

Et il se mit à fixer durement l’objet de son discours comme on ferait d’un animal étrange et répugnant que l’on croirait devoir examiner par curiosité, en dépit de son aversion. La pauvre créature ne put supporter cet examen ; elle en pâlit et rougit, et, les yeux brillants de larmes, elle mit toute la force de ses petits doigts à s’affranchir de la ferme étreinte de Catherine. Puis, s’apercevant que, dès qu’elle parvenait à soulever un des doigts qui la tenaient, un autre s’abaissait, elle commença à se servir de ses ongles et griffa les mains de son ennemie.

— Voilà, une tigresse ! s’écria celle-ci, lui rendant enfin sa liberté. Allez vous-en, pour l’amour de Dieu, et cachez votre maudite figure ! Quelle folie de révéler devant lui ces griffes ! Ne pouvez-vous pas deviner les conclusions qu’il va en tirer ? Heathcliff ! Voilà des instruments d’exécution, il faut que vous preniez garde à vos yeux.

— Je les arracherais de ses doigts si jamais ils me menaçaient, répondit brutalement Heathcliff, quand la porte se fut refermée derrière la jeune fille. Mais quelle intention aviez-vous en agaçant cette créature d’une telle façon, Cathy ? vous ne disiez pas la vérité, n’est-ce pas ?