Page:Brontë - Les Hauts de Hurle-Vent, 1946.djvu/430

Cette page n’a pas encore été corrigée

tout seul ; puis, parce que j’ai ri, il a brûlé ses livres et abandonné son étude. N’a-t-il pas été bien stupide ?

— N’avez-vous pas été bien méchante ? Répondez à cette question.

— Peut-être ; mais je ne croyais pas qu’il aurait été si sot. Hareton, si je vous donnais un livre, le prendriez-vous maintenant ? Je vais essayer.

Elle lui mit dans la main celui qu’elle lisait en ce moment. Il le lança au loin et grommela que, si elle ne cessait pas, il lui tordrait le cou.

— Bon, je le mets là, dans le tiroir de la table ; et je vais me coucher.

Puis elle me dit à l’oreille d’observer s’il y touchait, et s’en alla. Mais il ne s’en approcha même pas ; ce que je lui annonçai le lendemain matin, à son grand désappointement. Je vis qu’elle était peinée de sa maussaderie et de son indolence persistantes ; sa conscience lui reprochait de l’avoir arrêté dans ses tentatives pour s’améliorer soi-même : et c’est bien ce qu’elle avait fait en réalité. Mais son ingéniosité se mit à l’œuvre pour réparer le mal. Pendant que je repassais, ou que j’étais occupée à quelque autre besogne sédentaire que je n’aurais pu faire convenablement dans le petit salon, elle apportait quelque joli livre et me le lisait tout haut. Quand Hareton était là, elle s’arrêtait en général à un passage intéressant et laissait le volume ouvert ; elle répéta plusieurs fois cette manœuvre. Mais il était têtu comme une mule et refusait de mordre à l’hameçon. Si le temps était pluvieux, il se mettait à fumer avec Joseph ; ils restaient assis, comme deux automates, de chaque côté du feu, le plus vieux heureusement trop sourd pour comprendre les vilaines sottises de Catherine, comme il aurait dit, le plus jeune faisant de son mieux pour avoir l’air d’y être indifférent.