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de clefs dans ma poche. Peut-être vais-je arriver à ouvrir la porte ; sinon, j’irai.

Catherine s’amusa à danser, de ci de-là, devant la porte pendant que j’essayais toutes les grosses clefs à tour de rôle. Je venais d’essayer la dernière et de constater qu’aucune ne convenait ; après avoir recommandé à ma jeune maîtresse de rester là, je me préparais à courir à la maison aussi vite que je pourrais, quand un bruit qui se rapprochait m’arrêta. C’était le trot d’un cheval. La danse de Catherine s’arrêta aussi.

— Qui est-ce ? demandai-je à voix basse.

— Hélène, je voudrais que vous puissiez ouvrir la porte, répondit-elle de même d’un ton inquiet.

— Ah ! Miss Linton, cria une voix grave (celle du cavalier), je suis heureux de vous rencontrer. Ne vous hâtez pas d’entrer, car j’ai une explication à vous demander et à obtenir de vous.

— Je ne vous parlerai pas, Mr Heathcliff, répondit Catherine. Papa dit que vous êtes un méchant homme et que vous nous haïssez, lui et moi ; et Hélène dit la même chose.

— Cela ne fait rien à l’affaire. Je ne hais pas mon fils, je suppose, et c’est à son sujet que je réclame votre attention. Oui, il y a de quoi rougir. Il y a deux ou trois mois, n’aviez-vous pas l’habitude d’écrire à Linton ? Et de jouer à l’amour avec lui, hein ? Vous mériteriez tous deux de recevoir le fouet. Vous spécialement, la plus âgée ; et la moins sensible, à ce qu’il paraît. J’ai vos lettres, et à la moindre insolence de votre part je les ferai tenir à votre père. Sans doute vous êtes-vous fatiguée de votre amusement et l’avez-vous envoyé au diable, n’est-il pas vrai ? Seulement vous avez du même coup plongé Linton dans un abîme de désespoir. Il avait pris la chose au sérieux, lui ; il était réellement amoureux.