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s’étaient relâchés et que sa tête pendait sur son épaule.

— Elle est évanouie ou morte, pensai-je. Tant mieux ! Mieux vaut pour elle la mort que de languir comme un fardeau et une source de misère pour ceux qui l’entourent.

Edgar bondit vers son hôte inattendu, blême d’étonnement et de rage. Quelle était son intention, je ne saurais le dire ; quoi qu’il en soit, l’autre arrêta aussitôt toute démonstration de sa part en plaçant dans ses bras la forme en apparence inanimée de sa femme.

— Regardez ! dit-il. Si vous n’êtes pas un démon, soignez-là d’abord… vous me parlerez après.

Il passa dans le petit salon et s’assit. Mr Linton m’appela. Avec beaucoup de difficulté et après avoir eu recours aux moyens les plus variés, nous parvînmes à la faire revenir à elle. Mais elle était tout égarée ; elle soupirait, gémissait et ne reconnaissait personne… Edgar, dans son anxiété pour elle, oublia l’odieux ami de sa femme. Moi, je ne l’oubliai pas. À la première occasion, j’allai le supplier de partir, lui affirmant que Catherine était mieux et que je lui ferais savoir dans la matinée comment elle avait passé la nuit.

— Je ne refuse pas de sortir de la maison, répondit-il, mais je resterai dans le jardin ; et ayez soin, Nelly, de tenir votre promesse demain. Je serai sous ces mélèzes. N’oubliez pas, ou je renouvellerai ma visite, que Linton soit là où non.

Il lança un coup d’œil par la porte entr’ouverte de la chambre et, s’étant assuré que mes dires semblaient exacts, il délivra la maison de sa funeste présence.