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Je sortis pour recommencer mes recherches. Je n’en rapportai que du désappointement, et celles de Joseph eurent le même résultat.

— C’gaillard-là y s’fait pire tous les jours ! observa-t-il en rentrant. Il a laissé la barrière grande ouverte, et l’poney de Miss il a foulé deux rangs de blés, en les traversant pour s’en aller dret dans l’pré ! Ben sûr que l’maître y fera eune vie d’tous les diables demain matin, et y n’aura point tort. Il est la patience même pour des créatures aussi négligentes et aussi odieuses… il est la patience même ! Mais ça n’durera pas toujours… vous verrez, vous tous ! Faudrait pas l’mettre hors de lui… ah ! mais non !

— Avez-vous trouvé Heathcliff, âne que vous êtes ? interrompit Catherine. L’avez-vous cherché, comme je vous en ai donné l’ordre ?

— J’aimerions mieux chercher l’cheval, répliqua-t-il, ce serait pus sensé. Mais je n’pourrions chercher ni le cheval ni l’homme par eune nuit comme celle-ci… aussi noire comme une cheminée ! Et Heathcliff, c’est pas un gars à venir à mon sifflet. P’t-être ben qu’y serait moins dur d’oreille avec vous !

C’était en effet une soirée très sombre, pour l’été. Les nuages paraissaient présager l’orage et je déclarai que ce que nous avions tous de mieux à faire était de rester tranquilles. La pluie qui menaçait ne manquerait pas de le ramener à la maison sans que nous eussions à nous donner d’autre peine. Néanmoins Catherine ne se laissa pas persuader de se calmer. Elle continua d’aller et venir, de la barrière à la porte de la maison, dans un état d’agitation qui ne lui permettait pas de repos. À la fin, elle adopta un poste permanent le long du mur, près de la route. Elle resta là, sans se soucier de mes remontrances, ni du tonnerre qui grondait, ni