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conde et aussi grasse que Mme Pelet était jaune et maigre ; sa toilette ne le cédait en rien à celle de mon hôtesse, et une guirlande de fleurs printanières de nuances diverses entourait la forme de son chapeau de velours violet.

J’avais à peine eu le temps de faire ces remarques sommaires, lorsque Mme Pelet, venant à moi d’un pas qui avait l’intention d’être élastique et léger, m’adressa la parole en ces termes :

« Monsieur est bien bon d’avoir quitté ses livres et de s’être dérangé de ses études, à la demande d’une personne aussi insignifiante que moi ; monsieur aura-t-il l’obligeance de mettre le comble à sa bonté, en me permettant de le présenter à ma très-chère amie, Mme Reuter, qui habite la maison voisine, le pensionnat de jeunes demoiselles ?

— Ah ! je savais bien qu’elle était vieille, dis-je en moi-même, et je pris un siège après avoir salué les deux amies ; Mme Reuter quitta son fauteuil et vint se mettre à table en face de moi.

— Comment trouvez-vous la Belgique, monsieur ? vous y plaisez-vous ? » me demanda-t-elle avec un accent du plus franc bruxellois ; je sentais maintenant toute la différence qui existait entre la prononciation élégante et pure de M. Pelet, par exemple, et le parler guttural et traînard des Flamands ; je répondis quelques phrases de politesse banale, très-surpris de voir une femme aussi commune à la tête d’une institution dont j’avais toujours entendu faire le plus grand éloge. Et certes, il y avait de quoi s’étonner : Mme Reuter ressemblait beaucoup plutôt à une grosse fermière, ou à une maîtresse d’auberge, qu’à la directrice rigide d’un pensionnat de jeunes filles. En général, sur le continent, ou du moins en Belgique, les vieilles femmes se permettent une liberté de manières et de langage que repousse-