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ces affreux panneaux de bois. Je savais qu’un arbre s’élevait auprès de ma fenêtre, j’en avais entendu les branches heurter pendant la nuit mon contrevent inamovible ; et, quand j’étais là aux heures de récréation, la voix de ces demoiselles arrivait jusqu’à moi. À parler franchement, mes spéculations poétiques étaient souvent troublées par les sons peu mélodieux qui, de ce paradis invisible, montaient bruyamment dans ma retraite ; et, pour tout dire, je me demandais lesquels, de nos élèves ou de celles de Mlle Reuter, avaient les meilleurs poumons ; dès qu’il s’agissait de crier, cela ne faisait plus le moindre doute : les jeunes filles l’emportaient évidemment sur les garçons. À propos, j’oubliais de dire que Mlle Reuter, mais cela se devine, était la vieille prude qui avait fait planchéier ma seconde fenêtre ; je dis vieille, bien que je ne connusse pas son âge ; mais cela devait être, à en juger d’après ses scrupules et sa prudence de duègne ; personne, d’ailleurs, ne disait qu’elle fût jeune ; elle s’appelait Zoraïde, et je me rappelle combien je m’amusai la première fois que je l’entendis nommer ainsi. Les populations du continent se permettent des fantaisies à propos de noms de baptême, que nous autres Anglais nous sommes trop raisonnables pour concevoir ; notre calendrier est vraiment trop restreint, Peu à peu les obstacles s’aplanirent devant moi ; j’avais, en moins de cinq ou six semaines, vaincu les difficultés inséparables de tout début dans une carrière nouvelle. Je parlais maintenant le français avec assez de facilité pour être à l’aise en face de mes élèves ; je les avais mis tout d’abord sur un bon pied ; et, comme je sus les y maintenir, jamais l’idée de révolte ne germa parmi eux : chose extraordinaire pour des Flamands, et qu’apprécieront tous ceux qui connaissent les usages des pensions belges, et la manière dont les élèves s’y con-