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CHAPITRE VI.


Je rentrai dans la ville ayant très-faim ; le dîner que j’avais oublié se représentait à mon esprit sous, une forme des plus séduisantes, et c’est d’un pas rapide, aiguillonné par un vif appétit, que je remontai la rue qui conduisait chez moi. Il était nuit lorsque j’arrivai à ma porte ; l’air était glacé, et je frissonnai en pensant aux charbons éteints qui remplissaient ma grille et dont la cendre n’avait pas une étincelle : mais, a ma grande satisfaction, un bon feu brûlait dans l’âtre de mon petit salon, et la pierre du foyer avait été soigneusement balayée. Je revenais à peine de la surprise où me plongeait ce phénomène, lorsqu’un étonnement plus grand encore vint me saisir : quelqu’un était assis dans le fauteuil que j’occupais habituellement, et s’y prélassait les bras croisés sur la poitrine et les jambes étendues sur le tapis du foyer ; malgré ma vue basse et la clarté douteuse qui éclairait la pièce, j’eus bientôt reconnu M. Hunsden. La manière dont nous nous étions quittés la veille ne me rendait pas sa visite précisément agréable, et je lui souhaitai le bonsoir avec aussi peu de cordialité que possible. J’étais fort intrigué de savoir pourquoi il était venu, surtout quels motifs l’avaient poussé à intervenir aussi activement entre mon frère et moi ; cependant je ne pouvais me décider à lui faire de questions à cet égard ; je ne demandais pas mieux qu’il s’expliquât, mais je voulais que cette explication fût spontanée chez lui ; d’ailleurs je n’attendis pas longtemps.