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nufacturiers et négociants du nord de l’Angleterre ? Mais où est la supériorité ? ce n’est assurément pas eux qui la possèdent ; quant à leurs femmes, c’est différent ; elles cultivent leur beauté dès leur enfance et parviennent, à force de soins bien entendus, à un certain degré de perfection qui les place au-dessus du vulgaire ; mais c’est encore une supériorité douteuse. Comparez ce portrait avec la figure de Mme Édouard Crimsworth ; laquelle des deux est la plus belle au physique ?

— Comparez-vous à son mari, monsieur Hunsden, répondis-je tranquillement.

— Oh ! je sais à merveille qu’il est beaucoup mieux taillé que je ne l’ai jamais été ; il a le nez droit, les sourcils arqués, etc., etc. ; toutefois ce n’est pas de sa noble mère qu’il tient ces avantages, mais bien du vieux Crimsworth qui était, m’a dit souvent mon père, un franc teinturier, aussi teinturier qu’il est possible de l’être, et l’un des plus beaux hommes qu’il y eût dans tout le comté ; c’est vous, monsieur William, qui êtes l’aristocrate de la famille ; et vous êtes loin d’être aussi beau garçon que votre frère le plébéien. »

Il y avait, dans la manière franche et nette dont parlait M. Hunsden, quelque chose qui me plaisait ; elle me mettait à l’aise, et je poursuivis la conversation avec un certain intérêt.

« Comment savez-vous que je suis le frère de M. Crimsworth ? lui demandai-je ; je croyais n’être pour vous, comme pour tout le monde, qu’un simple commis, employé dans ses bureaux.

— Assurément ; qu’êtes-vous de plus qu’un simple commis ? Vous faites la besogne de Crimsworth qui vous paye pour la faire, et maigrement encore. »

Je ne répondis pas à ces paroles qui frisaient l’impertinence ; et pourtant la façon dont elles étaient prononcées n’avait rien qui me blessât, elles piquaient seu-