— Il y a de la méthode dans ma folie, et pas le moindre bon sens dans la vôtre.
— Oui ; votre système consiste à pressurer toute chose pour en retirer la séve et à faire du fumier avec le résidu, afin, dites-vous, de le rendre utile.
— Vous ne pouvez pas raisonner, dit Hunsden, vous n’avez pas de logique.
— Mieux vaut être sans logique que sans cœur, répliqua Frances qui, animée d’intentions hospitalières dans ses actes, sinon dans ses discours, allait et venait de son armoire à sa table, mettait la nappe et disposait tout ce qui était nécessaire pour le souper.
— Est-ce une pierre dans mon jardin, mademoiselle ? demanda Hunsden ; supposez-vous que je sois sans cœur ?
— Je crois-que vous analysez sans cesse vos sentiments et ceux des autres ; que, vous fondant sur l’erreur qui en résulte, vous dogmatisez à tort et à travers, et que, ne pouvant vous mettre d’accord avec vous-même, vous supprimez les sentiments comme incompatibles avec la logique.
— Et j’ai raison. »
Frances venait d’entrer dans une petite pièce qui lui servait d’office : « Vous vous trompez beaucoup, dit-elle en reparaissant bientôt. Ayez la bonté de me laisser approcher de la cheminée, monsieur Hunsden ; j’ai quelque chose à faire cuire. » Elle établit une petite casserole au-dessus du feu, et ajouta quelques instants après, tout en continuant sa cuisine : « Comme si l’on pouvait avoir raison d’anéantir tous les bons sentiments que le Créateur nous a donnés, surtout l’amour de la patrie, qui élargit le cœur de l’homme et qui étend son égoïsme à une nation tout entière !
— Êtes-vous née en Suisse ?
— Mais certainement.