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son départ ? était-il volontaire ou forcé ? Je me retins cependant, car nous étions entourés d’auditeurs ; mais lorsque, après la leçon, je rencontrai Sylvie dans le corridor, mettant son châle et son chapeau, je m’arrêtai court et lui demandai si elle connaissait l’adresse de Mlle Henri. « J’ai quelques livres à elle, ajoutai-je négligemment ; et je voudrais savoir où elle demeure, afin de les lui renvoyer.

— Non, monsieur, répondit la jeune fille ; mais la portière pourra sans doute vous le dire. »

Nous étions auprès de la loge ; j’y entrai immédiatement et je répétai ma question ; la portière, une Française vive et pimpante, qu’on appelait Rosalie, me regarda avec un sourire plein de malice, précisément l’espèce de sourire que je souhaitais le plus d’éviter. Sa réponse était préparée d’avance : elle me dit qu’elle ne savait pas l’adresse de Mlle Henri, et ne l’avait jamais sue. Persuadé qu’elle mentait et qu’on l’avait payée pour cela, je lui tournai le dos brusquement ; dans mon impatience, je renversai presque une personne qui se tenait derrière moi : c’était la maîtresse de la maison ; je fus obligé de lui adresser mes excuses, et je le fis avec plus de concision que de politesse ; il n’est pas un homme qui aime à être berné, et, dans la disposition d’humeur où je me trouvais alors, la vue de Mlle Reuter m’exaspérait au dernier point. Au moment où je m’étais trouvé face à face avec elle, sans qu’elle s’y attendît, elle avait l’air dur, le visage sombre ; ses yeux étaient fixés sur moi avec une expression de curiosité avide ; j’eus à peine le temps de surprendre sa physionomie, qu’elle en avait changé ; un doux sourire entr’ouvrit ses lèvres, et mes excuses furent admises avec une grâce charmante.

« N’en parlez pas, je vous prie ; c’est à peine si votre coude a effleuré mes cheveux ; tout le mal se borne à