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n’avais pas distingué la nuance tout d’abord, voilés qu’ils étaient de larmes contenues, maintenant éclairés par la divine étincelle qui réchauffait son cœur, montraient un large iris d’un brun clair, brillant sous de longs cils qui le couvraient d’ombre sans en atténuer la flamme ; une transparence de teint arrivant à la fraîcheur, un léger embonpoint qui adoucissait les lignes de ses traits nettement dessinés, avaient remplacé la pâleur que l’inquiétude et l’abattement répandaient naguère sur sa figure un peu longue, qu’ils avaient émaciée ; sa taille gracieuse et d’une hauteur moyenne avait eu sa part de cet heureux changement ; elle était devenue plus ronde, et, comme l’harmonie de ses proportions était parfaite, personne ne s’apercevait, ou du moins je ne songeais pas à me plaindre de la gracilité de ces formes élégantes dont les lignes étaient si pures ; quant à moi, le tour exquis du corsage, les attaches de la main et du pied, satisfaisaient complètement les notions que j’avais acquises sur la beauté plastique, et donnaient à ses mouvements une aisance, à sa démarche légère une souplesse qui répondaient à l’idée que je m’étais faite de la grâce féminine.

Ainsi éveillée à la vie, Frances commençait à se placer dans le pensionnat sur un pied tout nouveau ; le développement de son intelligence frappa bientôt les moins clairvoyants ; l’envie elle-même fut forcée de reconnaître ses brillantes facultés ; et lorsque la jeunesse vit qu’elle avait de brillants sourires, une conversation enjouée, des mouvements gracieux et rapides, elle la reconnut pour une de ses sœurs et la toléra comme étant de sa famille.

J’observais cette-transformation de l’œil attentif d’un jardinier qui surveille la croissance d’une plante précieuse qu’il élève ; et comme lui je contribuais à l’épanouissement de ma fleur favorite. Il ne m’était pas dif-