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hommes sont bien meilleurs juges que les femmes. Excusez, je vous prie, mon importante ; mais je m’intéresse tellement à cette pauvre petite ! elle n’a personne au monde sur qui elle puisse compter ; pas d’autre fortune que son aiguille ; pas d’autre espoir que l’instruction qu’elle pourra peut-être acquérir ; je me suis trouvée jadis dans une position à peu près pareille à la sienne, et il est tout naturel qu’elle m’inspire une profonde sympathie ; quand je vois la difficulté qu’elle éprouve à se faire obéir de ses élèves, je ressens un véritable chagrin. Je ne doute pas qu’elle ne fasse tout ce qu’elle peut ; elle a d’excellentes intentions, mais elle manque de tact et de fermeté ; je lui en ai souvent parlé, et sans aucun succès ; probablement que je ne sais pas m’exprimer, car elle n’a jamais paru me comprendre. Voudriez-vous être assez bon pour lui donner un conseil à cet égard lorsque vous en trouverez l’occasion ? Les hommes ont bien plus d’influence que les femmes ; leurs arguments ont plus de force que les nôtres, ils sont bien plus logiques ; et vous, monsieur, qui possédez plus que personne le talent de vous faire obéir, si vous lui disiez un mot ou deux sur le sujet en question, je suis sûre que vous obtiendriez un excellent résultat ; alors même qu’elle y mettrait de la mauvaise grâce et de l’entêtement (ce que je ne crois pas), il lui serait impossible de ne point vous écouter ; pour ma part, je n’assiste jamais à l’une de vos leçons sans faire mon profit de la manière merveilleuse dont vous dirigez vos élèves. Les autres professeurs me désespèrent et sont pour moi un véritable tourment ; aucun d’eux ne sait inspirer de respect, ni réprimer la légèreté qui est naturelle aux jeunes filles ; tandis qu’avec vous, monsieur, tout cela marche à merveille. Essayez alors d’inculquer à cette pauvre enfant la manière de conduire nos turbulentes Brabantoises ; mais je vous en