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petites mains poursuivent assidûment la tâche modeste qu’elle a entreprise ; pourvu qu’elle puisse achever cette bourse, terminer ce bonnet grec, elle sera contente, c’est toute son ambition. Un homme vient-il à s’approcher d’elle : un calme plus profond, une modestie plus grande encore se répandent sur ses traits et l’enveloppent tout entière ; observez alors ses sourcils, et dites-moi s’il n’y a pas du chat dans l’un et du renard dans l’autre.

— Je ne manquerai pas de le remarquer à la première occasion.

— Ce n’est pas tout, continua M. Pelet ; la paupière s’agite, les cils pâles se relèvent pendant une seconde, l’œil bleu darde son regard furtif et scrutateur entre les plis du voile qui l’abrite, et disparaît de nouveau dans l’ombre. »

Je ne pus m’empêcher de sourire ; M. Pelet en fit autant.

« Pensez-vous qu’elle se marie un jour ? demandai-je après quelques instants de silence.

— Les oiseaux s’apparient-ils ? répondit l’instituteur.

Elle a certainement l’intention de se marier dès qu’elle trouvera un parti convenable ; et personne mieux qu’elle ne sait le genre d’impression qu’elle est capable de produire ; personne plus qu’elle n’aime à vaincre sans bruit, et je serais bien étonné si elle ne laissait point sur ton cœur l’empreinte de ses pas insidieux.

— Oh ! certes non ! Mon cœur n’est pas une planche sur laquelle on puisse marcher.

— Mais le doux attouchement d’une patte de velours ne lui ferait aucun mal !

— Jusqu’à présent je n’ai pas eu à m’en défendre ; elle ne me fait nullement patte de velours, elle est au contraire avec moi toute cérémonie et toute réserve.