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— Et y a-t-il des dames au château ?

— Oui, il y a Mme Eshton avec ses trois filles, des jeunes filles vraiment charmantes, Mlles Blanche et Mary Ingram, qui, je crois, sont bien belles. J’ai vu Mlle Blanche il y a six ou sept ans ; elle avait dix-huit ans, et était venue à un bal de Noël donné par M. Rochester. Ah ! ce jour-là, la salle à manger était richement décorée et illuminée. Je crois qu’il y avait cinquante ladies et gentlemen des premières familles ; Mlle Ingram était la reine de la fête.

— Vous dites que vous l’avez vue, madame Fairfax. Comment était-elle ?

— Oui, je l’ai vue ; les portes de la salle à manger étaient ouvertes, et, comme c’était le jour de Noël, les domestiques avaient le droit de se réunir dans la grande salle pour entendre chanter les dames. M. Rochester me fit entrer, je m’assis tranquillement dans un coin et je regardai autour de moi ; je n’ai jamais vu un spectacle plus splendide ! Les dames étaient en grande toilette. La plupart d’entre elles, ou du moins les plus jeunes, me semblèrent fort belles ; mais Mlle Ingram était certainement la reine de la fête.

— Et comment était-elle ?

— Grande, une taille fine, des épaules tombantes, un cou long et gracieux, un teint mat, des traits nobles, des yeux un peu semblables à ceux de M. Rochester, grands, noirs et brillants comme ses diamants. Ses beaux cheveux noirs étaient arrangés avec art ; par derrière, une couronne de nattes épaisses, et par devant, les boucles les plus longues et les plus lisses que j’aie jamais vues. Elle portait une robe blanche ; une écharpe couleur d’ambre, jetée sur une de ses épaules et sur sa poitrine, venait se rattacher sur le côté et prolongeait ses longues franges jusqu’au dessous du genou. Ses cheveux étaient ornés de fleurs également couleur d’ambre, et qui contrastaient bien avec sa chevelure d’ébène.

— Elle devait être bien admirée ?

— Oh oui ! et non seulement pour sa beauté, mais encore pour ses talents, car elle chanta un duo avec M. Rochester.

— M. Rochester ! Je ne savais pas qu’il chantât.

— Ah ! il a une très belle voix de basse et beaucoup de goût pour la musique.

— Et quelle espèce de voix a Mlle Ingram ?

— Une voix très pleine et très puissante ; elle chantait admirablement, et c’était un plaisir de l’entendre. Ensuite elle joua du piano ; je ne m’y connais pas, mais j’ai entendu dire