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dre ses enfants de bonne heure, puis de les lui rendre dégrossis pour quelque occupation lucrative.

Ce courant abandonné à lui-même conduirait, par une pente certaine et prochaine, à l’abolition dans l’enseignement public de toute la partie désintéressée, c’est-à-dire supérieure, des études littéraires et scientifiques.

« Cinq et quatre font neuf ; ôtez deux, reste sept.
— C’est bien dit ; va, tu sais tout ce qu’il faut savoir, »

deviendrait notre devise ; la société française se partagerait entre les gens de métier, les gens de loi et les gens d’affaires. Les études qui prennent du temps et ne mènent à rien, c’est le mot, tombées dans le décri, ne subsisteraient que comme un privilège de la richesse oisive ou une fantaisie de curieux.

À quoi bon les études classiques, les prétendues humanités ? Qu’a-t-on à faire de gaspiller huit ou dix ans à se barbouiller de grec et de latin ? À quoi bon les mathématiques pures, la physique transcendante, la science pour la science ?

Les savants ne sont bons que pour prêcher en chaire.

Passe pour la chimie appliquée aux arts ; pour