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bois ; quand tous les fourneaux étaient ainsi chargés et disposés, un artilleur parcourait à toute course la longueur de la muraille, jetant sur chaque palette une étoile de feu d’artifice, et, dès qu’il avait tourné l’angle et qu’il était à l’abri de l’explosion, on voyait, tant la durée de l’effet de la poudre avait été mise en rapport exact avec la course de l’artilleur, on voyait, dis-je, la muraille s’ébranler par le pied, osciller quelques instants, puis enfin s’affaisser sur elle-même, le sommet croulant sur la base, au milieu d’un nuage de poussière, mais presque sans détonation.

Avant de quitter Raab, j’appris, non sans quelque consternation, qu’au lieu de rentrer en France, et peut-être d’y recevoir quelque avancement, j’étais destiné à devenir intendant de l’un des régiments croates, cédé à la France par le traité de paix ; on sait qu’il faut entendre, sous ce nom, un district militairement constitué ; ma résidence devait être à l’avenir Pétrinia, sur les bords de l’Unna, qui sépare la Croatie de la Bosnie.

Je revins à Vienne, et j’y passai environ trois semaines. Comme l’armée française l’occupait encore au moment de mon arrivée, je fus logé par l’autorité militaire dans la maison du comte Nickle