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qui voulait la paix en se réservant de la faire payer à l’Autriche aussi cher que possible. Au total, l’aspect de cette conférence était mélancolique, bien que les grands personnages qui la composaient ou la fréquentaient affectassent une grande liberté d’esprit et une insouciante légèreté.

On sait comment ont fini ces négociations. L’empereur de France et celui d’Autriche étant convenus de s’entendre directement, sans autre intermédiaire que M. de Bubna, porteur des paroles de l’un à l’autre, la conférence d’Altenbourg finit de sa belle mort, après beaucoup de paroles et de paperasses perdues.

Dans ses voyages continuels entre Schœnbrunn et Dotie, M. de Bubna s’arrêtait habituellement à Raab, et venait déjeuner ou dîner chez M. de Narbonne, qu’il avait connu à Paris. C’était, sous l’aspect extérieur d’un militaire, franc, ouvert, voire même un peu brutal, un esprit singulièrement fin, délié, rusé et plein de malice. Je prenais grand plaisir à l’entendre et à m’entretenir, après son départ, avec M. de Narbonne du sens véritable des demi-confidences qu’il nous prodiguait, supposant apparemment à M. de Narbonne une influence