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et qui excita le courroux de la docte assemblée, le rendait, pour le Publiciste, un collaborateur trop compromettant.

Je fréquentais en même temps une autre société de beaux esprits ; celle-ci se réunissait chez M. Legouvé ; elle était principalement composée de poètes et d’auteurs dramatiques. MM. Say, Jouy, Arnaud, etc., y tenaient le dé ; on y médisait des critiques et des journalistes. M. Legouvé, alors à la fin de sa carrière, était d’un esprit aimable, sage et doux. Madame Legouvé avait, si je ne me trompe, épousé, en premières noces, le célèbre chirurgien Sue. M. Eugène Sue était son fils.

J’entrai, à la même époque, dans le monde, dans le vrai monde, dans la société proprement dite. Bien que ma mère passât désormais son année entière aux Ormes, uniquement consacrée, après le mariage de mes sœurs, à l’éducation de sa nouvelle famille, ses amis, les personnes avec lesquelles elle avait été liée en d’autres temps ne l’oubliaient pas. Son souvenir et le nom que je portais m’ouvraient facilement l’accès des maisons où les débris de l’ancien régime se ralliaient et donnaient le ton à la société d’abord consulaire et bientôt impériale. L’hôtel de Luynes était au premier rang ; là régnait,