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Durant le cours des trois années qui terminent le dernier siècle, années que nous passâmes aux Ormes, en été, et en hiver à Paris, deux événements, l’un privé, l’autre public, sont principalement restés dans ma mémoire.

Le premier, c’est mon voyage à Broglie.

Broglie avait été confisqué, sur mon grand-père, comme émigré, et sur mon père comme condamné ; c’est à ce dernier titre qu’il nous fut restitué, grâce à la proposition courageuse de M. de Pontécoulant, l’un des hommes qui, dans le cours de nos troubles civils, ont le plus honoré le nom d’homme et le nom de Français.

Il nous fut restitué intégralement, à mes sœurs et à moi, bien que mon père, par son contrat de mariage, n’y eût droit que jusqu’à concurrence de huit cent mille francs. Mais la valeur des propriétés foncières était tombée si bas en 1794, que le domaine tout entier ne fut pas évalué au delà de cette somme ; nous avons depuis tenu compte de la plus-value aux enfants de mon grand-père.

Je fis mon entrée seigneuriale à Broglie, dans une cariole que, mon précepteur et moi, nous conduisions alternativement. Le château dont le mobilier avait été vendu, pendant la confiscation, étant