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qui ne lui était pas naturelle, eut beaucoup de peine à obtenir de moi que je me fisse présenter au grand-duc et à la grande-duchesse de Toscane. Je m’y résignai de guerre lasse ; je fus présenté, revêtu ou travesti de l’habit habillé que me prêta M. Corsini, que j’avais connu conseiller d’État sous l’Empire, lorsque la Toscane faisait partie de l’Empire. Le grand-duc était un petit homme, doux, poli, timide, embarrassé, mais d’un esprit très cultivé, très versé dans les sciences, connaissant à fond la littérature de tous les pays de l’Europe. Je fis connaissance avec son bibliothécaire, et, par lui, avec sa bibliothèque, la chose la plus digne d’envie qui me soit jamais tombée, non sous la main, car elle n’était qu’à l’usage du maître, mais sous les yeux. C’était une collection merveilleusement choisie des meilleurs auteurs classiques ou semi-classiques dans toutes les langues anciennes ou modernes qui possèdent des ouvrages dignes de ce nom, disposée dans un ordre parfait, reliée avec goût et simplicité, également agréable à l’œil et facile à l’usage ; je ne pouvais me lasser de les feuilleter. J’y retournais sans cesse, et, de là, dans ces quatre salles du palais Pitti, qui contiennent, selon moi, plus de trésors que le Vatican, plus