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de sérieux dans les négociations de Prague, c’eût été une insigne maladresse de nommer dans un pareil moment un gouverneur général pour cette même Illyrie qu’on faisait semblant d’offrir à l’Autriche ; mais, au point où nous en étions, tout devenait à peu près indifférent. Le duc d’Otrante resta trois jours avec nous, vit M. de Metternich, et lui débita des balivernes. Il causa beaucoup avec nous, ne dit pas grand’chose et ne payait point de mine. Sa figure chafouine ne promettait que ce qu’elle tenait ; il avait tout l’air d’un coquin de bas étage et personne n’aurait deviné qu’il serait un jour ministre du roi très chrétien.

Enfin, le jour fatal arriva où l’armistice expirait, où cessait tout espoir de s’entendre, où le médiateur devenait belligérant. Nous fîmes nos dispositions de départ ; aussi bien notre position n’était plus tenable ; nous ne pouvions traverser les rues sans être insultés ; les théâtres retentissaient d’applaudissements aux farces qui déversaient sur la France l’outrage et la dérision. On dressait des tréteaux ambulants pour les venir jouer sous nos fenêtres.

La veille de notre départ, M. de Narbonne m’envoya chez M. de Metternich, pour régler toutes les formalités relatives aux passeports, sauvegardes,