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aimé même, grâce à ma mère, des habitante d’une contrée qui portait à regret le joug de la France ; mais la liberté de son langage, son attitude fière et résolue, l’impossibilité d’obtenir de lui ce qui lui paraissait contraire à la justice et à la raison, le plaçaient constamment en chair vive vis-à-vis de l’autorité supérieure et des autorités collatérales. Il nous racontait quelquefois, à ce sujet, des anecdotes curieuses ; je n’en citerai qu’une seule, parce qu’elle caractérise parfaitement le régime impérial.

M. Réal était à Anvers.

M. Réal était l’un de ces jacobins convertis, sans effort, au pouvoir absolu, et qui portaient gaillardement la livrée de leur nouveau maître. Il était conseiller d’État, et chargé de l’une des divisions de la police de l’Empire, celle dans laquelle Anvers se trouvait compris, plus heureux, en cela, que son camarade Barrère, devenu simple espion.

C’était un samedi soir, veille d’une fête solennelle.

M. Réal ayant demandé au préfet s’il assisterait à la procession et à la grand’messe, et celui-ci s’en étant excusé, il le prit à part, lui fit des reproches, d’abord tendres, puis sérieux, et l’exhorta au bien et